Bulletin Vert n°520
septembre — octobre 2016
Le cerisier et autres contes Balades philosophiques à travers les mathématiques
par Sylvie Leclerc-Reynaud
L’Harmattan, 2015
186 pages en 13,5 × 22, prix : 19,50 €, ISBN : 978-2-343-07998-1
L’auteure, documentaliste de formation philosophique, anime depuis cinq ans un atelier de philosophie avec des collégiens. Dans ce livre, qui s’adresse aux enfants à partir de 10 ans, elle a intégré des notions mathématiques des programmes de CM2 et Sixième, avec relecture par deux enseignantes de mathématiques, et des dessins humoristiques de cinq dessinateurs.
Les deux Préfaces, de Stella Baruk (qu’on ne présente plus) et de Brigitte Rebmeister (professeure de lettres), mettent l’accent sur la polysémie de certains mots, source de nombreuses incompréhensions : « juste » renvoie aussi bien à « justesse » qu’à « justice » ; « sujet » est un terme grammatical mais aussi historique (les sujets d’un roi). La deuxième ouvre la piste d’un travail interdisciplinaire mathématiques/enseignement moral et civique, peu ou pas pratiqué jusqu’à présent.
Dans son Avant-propos, l’auteure compte sur le merveilleux et la personnification des êtres mathématiques, sur l’entrée en jeu de l’émotion, pour faciliter l’assimilation des savoirs.
Chacun des 49 contes est suivi de pistes de réflexion (« Dans l’atelier du philosophe ») et d’une énigme mathématique (« Dans le laboratoire du mathématicien ») ; les solutions de ces énigmes sont regroupées en fin d’ouvrage.
On trouve également des notes de vocabulaire, des notes étymologiques, et des citations de nombreux philosophes (parmi lesquels, souvent, Épicure et André Comte- Sponville).
L’ ouvrage est complété par deux Index : notions mathématiques, notions philosophiques.
Les textes ne correspondent pas exactement à la forme littéraire du conte, où on attend un déroulement suivi d’un dénouement (généralement heureux). Il s’agit plutôt de situations, choisies de façon à poser des questions philosophiques d’une part, mathématiques d’autre part. Le lien entre les deux est parfois fort : le mot « égalité » est commun aux deux domaines ; la notion d’équité d’un partage conduit tout naturellement aux divisions et aux fractions... Dans d’autres cas ce lien est un peu artificiel, voire inexistant.
On peut regretter quelques imprécisions ou incorrections mathématiques : la définition de la proportionnalité est trop vague ; quatre triangles quelconques ne forment pas une pyramide… Mais surtout on note beaucoup d’occasions ratées d’ouvertures vers des notions qui seront vues plus tard : les triangles en se regroupant peuvent, certes, former une pyramide (p. 165), mais aussi un octaèdre ou un icosaèdre ; l’énigme de la page 79 déboucherait tout naturellement sur une initiation aux suites géométriques, au calcul de la somme de leurs termes, et à la notion de limite nulle…
Ce petit livre est donc perfectible, mais il a la qualité essentielle de relier, dès les petites classes, les mathématiques à la pensée, la réflexion, l’éthique (ainsi qu’au français). Cette orientation mérite l’attention de tous les enseignants ; et ils pourront eux-mêmes, à partir de certains de ces contes, construire des activités enrichies.