Bulletin Vert no 456
janvier — février 2005
PAUL LÉVY, MAURICE FRÉCHET, 50 ans de correspondance mathématique
Édité par Marc Barbut, Bernard Locker et Laurent Malziak.
HERMANN (Collection Histoire de la pensée) mars 2004.
315 pages.
Prix : 28 euros.
ISBN 2 7056 6473 4.
Contrairement à ce à quoi le titre pourrait faire penser, il s’agit en fait de 107 lettres de Paul Lévy (1886-1971) adressées à Maurice Fréchet (1878-1973) entre le 29 décembre 1918 et le 19 octobre 1965 et qui figurent dans les archives de l’Académie des Sciences car Fréchet conservait tous les documents en sa possession tandis que celles que recevait Paul Lévy entre les deux guerres ont été saccagées par la Gestapo en 1942. Bien entendu, il est facile de restituer la trame des réponses de Fréchet à Lévy.
Cet échange régulier de questions, de problèmes, de réflexions, de réactions à un événement ou une publication serait parfois difficile à suivre pour un jeune lecteur malgré tout l’éclairage qu’il apporte sur la vie du chercheur, ses doutes et marches en arrière, sa joie de la découverte, son besoin de communiquer avec ses pairs, si les trois auteurs n’avaient pris soin de situer cette correspondance dans la vie mathématique du temps en rédigeant une première partie de 80 pages.
Cette longue introduction présente toute l’œuvre de Paul Lévy dans son originalité et ses relations avec les grands mathématiciens de l’époque : Fréchet, Borel et Hadamard en France, mais aussi russes et soviétiques, américains et japonais.
Un an avant sa mort, Paul Lévy avait publié un livre de réflexions et de souvenirs : « Quelques aspects de la pensée d’un mathématicien » où il présentait avec simplicité et franchise sa démarche de chercheur, mais cette première partie permet avec plus de trente ans de reçu de mieux évaluer son apport essentiel au fantastique développement du calcul des probabilités et en particulier de son école française dans la seconde moitié du XXe siècle. Elle est divisée en huit chapitres :
- Borel et Hadamard.
- Les probabilités en France au début du XXe siècle (rappelons que la chaire de calcul des probabilités à la Sorbonne fut tenue successivement par Borel, Fréchet, G. Darmois, tandis que Paul Lévy occupait la chaire d’analyse de l’école Polytechnique et qu’il ne participait à l’enseignement universitaire que par un séminaire).
- L’école probabiliste russe et soviétique avant 1940 (Chebyshev, Markov, Bernstein, Khinchin, Kolmogorov, …).
- Quelques travaux croisés de Lévy et Fréchet (intégrale de Fréchet et moyennes de Lévy, différentielles, probabilités).
- Les lois stables de Lévy.
- Lévy et la Théorie du Potentiel.
- Lévy et le mouvement Brownien.
- Lévy et les intégrales.
La seconde partie donne l’intégralité des 107 lettres qui constituent un témoignage de première main sur la vie des mathématiques et des mathématiciens durant une bonne partie du XXe siècle. Le livre s’achève par une abondante bibliographie et par la liste des près de 200 mathématiciens cités. Ces lettres apportent un éclairage nouveau sur la profonde originalité de l’œuvre de Paul Lévy, en marge des sentiers battus. Un livre à recommander à tous ceux, mathématiciens, historiens et philosophes qu’intéresse l’éclosion d’une branche des mathématiques.
Remercions Bernard Bru, à qui l’ouvrage est dédié, d’avoir soutenu cet excellent travail.