Bulletin Vert n°493
mars — avril 2011
Découvertes en pays d’Islam
Au hasard d’une émission de radio, j’ai entendu Pierre Léna, astrophysicien et responsable de La Main à la Pâte (Lamap), présenter une série d’activités destinées aux élèves du Cycle 3 et du Collège (Sixième et Cinquième).
Ce projet, Les découvertes en pays d’Islam [1] , propose aux enseignants et aux élèves d’étudier une découverte ou invention scientifique de l’âge d’or de la science arabe (VIIe — XVe siècle). Les activités présentées aux élèves et disponibles sur le site indiqué, s’organisent autour :
- d’une recherche documentaire sur un savant arabe et sa découverte,
- de la reproduction en classe d’une expérience importante concernant cette découverte, avec un matériel simple,
- d’un échange avec les autres classes engagées dans le projet.
L’espace enseignants propose pour chaque découverte un module pédagogique, afin d’accompagner l’enseignant dans la mise en œuvre du projet en classe.
L’espace élèves contient pour chaque découverte une petite animation destinée aux enfants.
Les classes participantes sont invitées à écrire ensemble une « Encyclopédie des enfants » (fondée sur le principe du Wiki), à partir de leurs investigations et des recherches documentaires.
Parmi ces activités, plusieurs ont une composante mathématique non négligeable, dont les développements vont bien au-delà du niveau scolaire auquel elles sont destinées. Elles peuvent donc être déclinées jusqu’au lycée, en particulier dans le module Méthodes et Pratiques Scientifiques.
Il appartient donc à chaque enseignant d’extraire de la riche documentation attachée à chacune d’elles, ce qui convient au niveau de connaissances de ses élèves. Mais même au Cycle 3, il est préférable que le professeur ait compris lui-même la modélisation des phénomènes, même s’il ne la met pas en œuvre dans la classe…
Voyez par exemple la théorie de l’arc-en-ciel d’al-Fârisi.
Un texte pédagogique est rédigé pour les enseignants : il est riche et dense. Il décrit les moyens de fabriquer un arc-en-ciel en classe…
L’ENS de Lyon propose une galerie d’images, des explications plus théoriques, et répond à de nombreuses questions. Une modélisation et une étude mathématique du phénomène sont proposées sur ce site.
Une biographie rapide d’al-Fârisi (en anglais : vive l’interdisciplinarité !) complète l’ensemble, ainsi qu’une bibliographie.
On peut rattacher à cette activité la théorie de la vision et du rayon lumineux d’Ibn al-Haytham, proposée dans la même série.
Il y a là de quoi intéresser des élèves, tout en leur faisant découvrir des mathématiques et des sciences d’une certaine consistance.
Il en est de même de l’activité autour de l’astrolabe d’Abu Behr Ibn Yussuf.
La partie réservée aux enseignants a la même structure que celle décrite à propos de l’arc-en-ciel. Bonne surprise, elle renvoie vers l’impressionnant site de Philippe Dutarte [2], bien connu des lecteurs du BV. Hélas, le lien sur le site de Lamap est erroné ! Il n’a pas été rétabli, bien que j’ai signalé sur le site même l’erreur et l’adresse actuelle. Une étonnante absence de réactivité de la part de Lamap.
L’astrolabe dans toute sa splendeur et complexité y figure sous la rubrique Étude d’instruments. Tout ce qu’indique la fiche pédagogique de l’activité se trouve sur le site, source de nombreuses découvertes.
Le reste de la documentation proposée par Lamap est impeccable, abondante et précise. De quoi susciter bien des vocations !
On peut associer à cette activité celle consacrée à l’observatoire de Samarkand d’Ulugh Beg, avec en particulier, la construction d’une lunette astronomique simple (et très peu coûteuse), mais oh combien passionnante à utiliser avec de jeunes élèves (j’en ai fait l’expérience en centre de vacances).
Dernière activité avec une intéressante composante mathématique, celle consacrée aux symétries en Islam.
Point n’est besoin d’insister : l’animation proposée aux élèves est très parlante (c’est dans l’espace classes). Mais fidèle à sa philosophie (la lecture et l’écriture y sont essentielles), Lamap propose aussi un texte aux élèves pour stimuler leur réflexion.
Voici donc dix activités, dont plusieurs ont une partie mathématique de qualité. Il me semble qu’on peut les proposer (avec des modalités et des accents différents) du Cycle 3 au Lycée.
La présentation du projet (s’informer sur le projet pédagogique) dans l’espace enseignant élargit le propos et laisse entrevoir un projet culturel et citoyen que l’APMEP ne peut qu’approuver :
Les activités proposées, qui articulent démarche d’investigation et histoire des sciences permettent de prendre la mesure des cheminements complexes, des discussions et des controverses qui accompagnent les découvertes et les inventions. Sa transposition en classe est une occasion privilégiée pour les élèves d’appréhender la nature de la science et de s’initier aux étapes fondamentales de la démarche d’investigation scientifique : le questionnement et la formulation d’hypothèses.
L’exploration de l’âge d’or des sciences arabes témoigne du caractère universel de la science et de son inscription dans des cultures différentes.