Bulletin Vert n°470
mai — juin 2007
Démarche expérimentale
et apprentissages des mathématiques
La Veille Scientifique et Technologique (VST) de l’INRP vient de publier en ligne http://www.inrp.fr/vst/Dossiers/Demarche_experimentale/sommaire.htm un dossier intitulé « Démarche expérimentale et apprentissages des mathématiques ».
Ce dossier interroge la place et le rôle de la démarche expérimentale dans l’apprentissage des mathématiques. Il précise d’abord le sens des termes : « Expérimenter en mathématiques, pratiquer la démarche expérimentale, ces expressions ont dans ce document un sens très précis. Il ne s’agit en aucun cas d’une manipulation qui serait en elle-même source de connaissance.
L’expérimentation telle que nous l’entendons n’a de sens que par ses articulations avec la formulation (dimension langagière) et la validation (par la preuve). Le va-et-vient entre théorie et expérience est précisément ce qui caractérise la démarche expérimentale. Il n’y a pas d’un côté les aspects expérimentaux et de l’autre côté la preuve, entre lesquels il faudrait choisir.
Le défi pour l’enseignement est de développer des situations d’apprentissage qui permettent les aller-retour entre les deux. Si, comme l’affirme Paul Langevin dans La pensée et l’action, “ Le concret, c’est de l’abstrait rendu familier par l’usage ”, les objets qui permettent l’expérimentation ne sont pas nécessairement des objets matériels. Ce sont des objets suffisamment familiers pour le sujet, qui servent de domaine d’expérience pour construire des connaissances plus complexes.
C’est par exemple le cas des nombres entiers et de leurs propriétés élémentaires pour la théorie des nombres.
Expérimentation, formulation-interprétation et preuve, chacun des trois mouvements de la pensée peut rétroagir sur les deux autres, créant de la sorte un réseau de « boucles de rétroaction » (boucles génératrices dans lesquelles les produits et les effets sont eux-mêmes producteurs et cause de ce qui les produit). Ainsi, l’échec d’une tentative de preuve peut amener à mieux tester la solidité de la conjecture née d’une expérimentation.
Il peut conduire à modifier la conjecture, voire l’expérimentation elle-même. Il peut aussi inciter à imaginer d’autres chemins de preuve.
De même, l’expérimentation mise en place pour cerner une question mathématique peut déboucher sur des résultats imprévus, surprenants, qui conduisent à des interrogations sur d’autres propriétés et sur de nouveaux domaines, sur de nouvelles conjectures et tentatives de preuve. »
Le dossier apporte un éclairage historique, culturel et institutionnel sur cette dimension de l’activité mathématique, ainsi que de nombreux exemples de sa mise en œuvre pour un public français et international.
Il met en débat certaines questions vives que soulève la prise en compte de cette démarche dans l’enseignement des mathématiques :
- La démarche expérimentale affaiblit-elle la nécessité de la preuve ?
- L’introduction d’une démarche expérimentale peut-elle réconcilier les élèves avec les études scientifiques ?
- La démarche expérimentale accompagne-t- elle une sélection sociale occulte ?
Le dossier est enrichi d’une bibliographie et d’une sitographie internationales conséquentes.
Fruit d’un intense travail collaboratif, ce dossier a été préparé à partir d’une étude réalisée pour l’équipe EducMath de l’INRP en 2006, coordonnée par Gérard Kuntz (animateur de l’APMEP et du réseau des IREM) et a bénéficié de contributions de Françoise Carraud (Centre Alain Savary INRP), Thierry Dias (LIRDHIST, Université Lyon1), Viviane Durand-Guerrier (LIRDHIST, Université Lyon 1), Françoise Poyet (VST) et Luc Trouche (INRP et LIRDHIST). Le texte original a été adapté et enrichi pour publication dans ce dossier de la Veille par Jana Trgalova (INRP et LIG) et Brigitte Bacconnier (VST).