Bulletin Vert n°490
bulletin spécial « Centenaire de l’APMEP »
L’Entre-deux-guerres
L’assimilation des enseignements féminin et masculin
La première guerre mondiale interrompt l’activité de l’A.P.M.E.S.P. d’une manière presque définitive. L’association recommence ses activités seulement à partir de l’année 1920 puisque le premier Bulletin publié après guerre est le n°17, daté de novembre 1919, alors que le numéro 18 est daté de janvier 1921. Il faut toute la conviction d’Émile Blutel et le militantisme de Charles Bioche, deux des personnages principaux de cette période, pour remettre en marche l’association
Les sujets d’études repris par les comités sont les mêmes qu’avant guerre. Le ministre de l’Instruction publique, Léon Bérard [1], entreprend une réforme profonde de l’enseignement secondaire qui va se traduire d’une part, par l’assimilation en 1924 des plans et structures d’études pour les jeunes filles et d’autre part, par un retour de la suprématie des humanités classiques dans ce qui s’appelle, à partir de 1925, les « programmes d’égalité scientifique ».
L’identification des deux enseignements masculin et féminin se réalise par le décret du 25 mars 1924. L’association publie le décret dans une demi-page de la rubrique Documents officiels de son Bulletin [2] :
Le décret du 25 mars 1924 institue, dans les lycées et collèges de jeunes filles un enseignement facultatif, dont la sanction est le Baccalauréat, à côté de l’enseignement sanctionné par le Diplôme de fin d’études secondaire et dont la durée est portée à six ans.
Le décret porte la durée d’étude des jeunes filles à sept ans pour préparer le baccalauréat, au même titre que les garçons, mais tout en conservant un caractère facultatif à cette possibilité. Le diplôme de fin d’études qui était jusque là le seul examen que les jeunes filles pouvaient passer au terme de cinq années d’études depuis son instauration en 1880 par Camille Sée, ne disparaît pas, mais trouve sa place à côté de la préparation au baccalauréat. Il voit en outre la durée de sa préparation augmentée à six ans. Les programmes et horaires de l’enseignement des garçons sont intégralement appliqués à la section Baccalauréat des jeunes filles et aux quatre premières années d’études de la section Diplôme.
Cette assimilation au sein de l’enseignement secondaire a comme conséquence l’élaboration d’une réflexion au sein de l’A.P.M.E.S.P., dès l’immédiat après guerre, sur la formation des enseignantes.
Dans ce but, l’A.P.M.E.S.P. lance dès le mois de janvier 1921 auprès de ses adhérents, une enquête sur la nécessité d’adapter les programmes de l’agrégation féminine [3] :
La préparation au baccalauréat étant établie dans presque tous les établissements scolaires de Jeunes Filles, il paraît souhaitable que les programmes de l’Agrégation des Jeunes Filles (section mathématique) soient modifiés. Les programmes actuels ne donnent pas aux Professeurs chargés de cet enseignement la culture nécessaire pour le bien donner.
Pendant toutes les années de l’Entre-deux-guerres, l’accent est mis sur la nécessité d’une agrégation féminine dont les contenus doivent être réévalués afin d’adapter le niveau de l’agrégation aux nouveaux plans d’études des programmes unifiés. Ce n’est cependant qu’au moment de la Seconde guerre mondiale que les programmes des agrégations féminine et masculine deviennent complètement identiques. La double agrégation reste en vigueur jusqu’en 1976, date où les concours sont définitivement fusionnés en une seule agrégation pour tous.
Les programmes d’égalité scientifique
Les programmes de l’enseignement secondaire publiés au journal officiel du 5 juin 1925 uniformisent les horaires des classes et les contenus des programmes dans tous les cycles, de la classe de Sixième à celle de Première incluse. Il n’est pas question ici de faire l’histoire complète de cette période riche en rebondissements, mais seulement d’indiquer ses grandes lignes et de montrer in extenso la réaction de l’A.P.M.E.S.P.
Le principe d’égalité scientifique est présenté par le ministère d’une manière équivoque [4] :
[…] désormais, les élèves des sections classiques puissent au sortir de la première entrer dans la classe de mathématiques et s’orienter vers les cours préparatoires aux Grandes Écoles scientifiques dans les mêmes conditions que leurs camarades des sections modernes.
Derrière cette intention, a priori louable, apparaît toutefois une autre volonté d’un retour à une orientation dans laquelle les tenants des humanités classiques regagnent le terrain perdu dans la réforme de 1902. C’est dans ce sens que l’analyse de l’association s’oriente. Elle dénonce ainsi un affaiblissement de l’enseignement scientifique qui, pour être désormais accessible à tous les élèves, doit être revu à la baisse dans ses exigences. La déclaration résolument opposée que l’A.P.M.E.S.P. publie en 1925 est à cet égard très précise et il n’est qu’à la lire pour se faire une opinion des conséquences des programmes d’égalité scientifique [5] dans la formation en sciences des jeunes Français :