Bulletin Vert n°511
novembre — décembre 2014
Inventions mathématiques Jouer avec l’arithmétique et la géométrie
par Jean-Paul Delahaye
Belin Pour la Science, 2014
192 pages en 18,5 × 24, prix : 25 €, ISBN : 978-2-84-24-5128-8
Il s’agit d’une compilation de 21 des opus de la rubrique « Logique et calcul » que l’auteur tient dans la revue Pour la Science, regroupés thématiquement :
- Partie 1 : Arts géométriques sur un plan
Impossible, en êtes-vous certain ?- Infini et impossible
- Non, la géométrie du triangle n’est pas morte
- Le pizzaïolo mathématicien
- Partie 2 : Jeux en trois dimensions
- Deux sculpteurs de mathématiques
- Surplombs maximaux
- Les 27 petits cubes de Piet Hein
- L’accrochage des tableaux
- Le Rubik’scube : pas plus de 20 mouvements !
- Partie 3 : Des ponts entre la géométrie et l’arithmétique
- Les plaisirs du rectangle
- L’automate des chiffres
- Le jeu des pousses
- La cryptographie visuelle
- Le problème de l’ange est résolu
- Partie 4 : L’insondable mystère des nombres entiers
- La marelle arithmétique
- Mille collections de nombres
- Les nombres premiers insolites
- La suite du lézard et autres inventions
- Déconcertantes conjectures
- Bricoles, babioles et surprises numériques.
- Une bibliographie de six pages complète l’ouvrage, qui est richement illustré en couleurs.
On est ici à cent lieues des mathématiques utilitaristes ; celles de J.-P. Delahaye se veulent ludiques et futiles (sauf peut-être le chapitre La cryptographie visuelle). Cependant mathématiciens confirmés aussi bien qu’amateurs passionnés ont « séché » pendant des années sur certains des problèmes abordés, en dépit de leur apparence farfelue ;l’auteur considère ceux-ci comme « pas plus absurdes que bien d’autres étudiés par des générations de mathématiciens, comme ce fut le cas du grand théorème de Fermat ».Même si on peut douter que les « nombres vampires » acquièrent un jour la même notoriété que les nombres premiers, on peut sans honte passer des heures à chercher comment reconstituer le Rubik’s cube en 20 mouvements, possibilité démontrée en 2010. Les points communs aux différents chapitres sont : l’omniprésence de l’informatique, au niveau de l’expérimentation productrice de conjectures, mais aussi au niveau de la preuve ; le grand nombre d’adresses Internet fournies ; l’appel aux lecteurs pour apporter leur contribution. Les démonstrations explicites sont rares, mais certaines sont bienvenues : ainsi on a la preuve que toute « figure impossible » décomposable en réunion de polygones représente un « vrai »polyèdre vu sous un certain angle.
Chaque énoncé est accompagné d’un historique et d’une présentation des mathématiciens impliqués. L’auteur évoque ses propres travaux en cours (chapitre sur la géométrie du triangle), et sa méthode de recherche, ce qui est intéressant en soi ; il nous livre ses réflexions sur les preuves d’impossibilité,sous un angle pédagogique ; il rend hommage à ses inspirateurs, au premier rang desquels Martin Gardner.
On peut être un peu agacé par le caractère artificiel de beaucoup des points de départ des problèmes ; par les fréquentes redondances entre le texte principal et celui des encadrés ; par quelques termes non définis(qu’est-ce que « le jeu de la vie » ? qu’est-ce qu’un « nombre de Chaitin » ?) ; par quelques incorrections (« le polynôme mini-mal (…) est $x^{3}=2 $ »).
On peut regretter que l’auteur n’ait pas saisi l’occasion de nommer certaines notions mathématiques, qu’il utilise pourtant (raisonnement par récurrence, groupe, …) Mais on ne peut qu’être séduit par la variété des thèmes et domaines abordés, par l’ingéniosité des chercheurs ; ainsi que par la qualité de l’édition, qui fait de ce livre un bel objet pouvant servir de cadeau.