Bulletin Vert n°508
mars — avril 2014
Le palimpseste d’Archimède
par Eliette Abécassis
Albin Michel, 2013
398 pages en 16 × 22,5, prix : 21,90€, ISBN : 978-2-226-24829-9
Intrigue policière, meurtres rituels, ésotérisme, sociétés secrètes, rites initiatiques, psychotropes, mythologies égyptienne et grecque, érudition historique et philosophique, magie et mystère des nombres, va-et-vient entre l’ère des pyramides et celle d’Internet, manuscrits perdus et retrouvés, voilà des ingrédients qui peuvent donner des chefs-d’œuvre littéraires sous la plume de, par exemple, Umberto Eco (Le nom de la Rose, Le pendule de Foucault, L’île du jour d’avant, …) ; Eliette Abécassis, elle, n’en tire qu’une historiette, dans le cadre de Normale Sup, pas désagréable à lire malgré un style un peu plat, voire scolaire, et quelques tournures syntaxiquement douteuses. Malgré la présence d’Archimède et les évocations d’Ératosthène, Hypathie et quelques autres, le lecteur non totalement ignare en mathématiques n’y apprendra pas grand chose dans ce domaine, et y trouvera quelques perles, anachronismes, absurdités, énormités, telles que « on ne sait même pas s’il [le nombre Pi] est infini ou pas », « le bruit des armes, des canons » à Syracuse en 212 av. J.C., « soit on croit en Pi, soit on croit en Jésus », « le codex d’Archimède contient la formule qui permet de calculer toutes les décimales de Pi » (quelque quinze siècles avant l’écriture décimale), « et donc de décoder la loi de l’univers », « ce chiffre absurde » (en parlant de Pi, dans la bouche d’un mathématicien). L’auteur, ex-normalienne qui estime fructueuse la cohabitation, à la rue d’ulm, entre scientifiques et philosophes, ne semble pas en avoir pleinement profité.
Plutôt que ces élucubrations d’une écrivaine « branchée », mieux vaut lire ou relire « Le Codex d’Archimède » de William Noel et Reviel Netz (J.-C. Lattès, 2008, recensé dans le BV 479), dont E. Abécassis s’est probablement inspirée : histoire authentique et palpitante d’un palimpseste (c’est-à-dire un parchemin gratté et recouvert d’un autre texte) perdu et retrouvé plusieurs fois, laborieusement déchiffré, et qui a révélé, sinon « le code qui régit le monde », du moins de précieux renseignements sur la pensée d’Archimède.