Formation
L’école académique de formation continue est arrivée dans nos académies... On aurait aimé savoir ce qui ne convenait pas dans les « DAFPEN [1] » et ce qui a motivé cette transformation. On aurait aimé être prévenus avant la mise en place de cette nouvelle structure et même recevoir un lexique pour essayer de comprendre ce qui se cache derrière le vocabulaire employé : « abonnement », « pré-inscription », « pilote »… On aurait préféré attendre que les personnes chargées de proposer des formations comprennent le nouveau fonctionnement et soient à même de le présenter aux personnels, avant de se précipiter. Mais puisque nous y sommes, une année bien difficile se profile, tant pour les stagiaires que pour les formateurs, car le système n’est pas à la hauteur des enjeux.
La formation continue est un droit, mais c’est surtout une garantie que les personnels évoluent avec la société, qu’ils et elles améliorent leur pratique. C’est aussi une assurance de rester en contact avec le monde de la recherche, en didactique, en neuroscience ou encore en pédagogie. C’est la promesse d’un enseignement renouvelé, vivant et ouvert aux autres.
Notre ministre promet dorénavant que les formations auront lieu le soir ou bien le mercredi après-midi ou encore pendant les congés scolaires… faut-il qu’il compte sur des enseignants dévoués pour espérer qu’ils ou elles consacrent encore davantage de leur temps personnel à leur métier ! Fait-il abstraction du profond découragement et des conditions d’exercices dégradées que subissent les personnels de l’Éducation Nationale depuis plusieurs années ? Souhaite-t-il augmenter encore la charge de travail, contribuer au manque de considération et saboter finalement la formation continue… on n’ose le croire.
Le temps de formation est un investissement : bien souvent c’est une journée très chargée avec parfois des déplacements de plusieurs heures, mais quand on l’a choisie, on veut s’informer, partager nos pratiques, échanger sur les modalités de mise en œuvre, se questionner sur la pertinence pédagogique et la plus-value pour notre enseignement. Ce temps est aussi un point de départ, celui d’une rencontre avec des collègues, celui d’un changement de méthode, ou celui d’un intérêt pour une nouvelle pratique. Chaque formation a potentiellement un retentissement sur des dizaines d’élèves de chaque professeur stagiaire qui accepte de faire évoluer sa façon de faire en classe. Quelle richesse pour nos élèves !
La nouvelle organisation est opaque, et aggrave une situation déjà inquiétante. Les formateurs et formatrices souvent enseignants et enseignantes aussi, ne veulent pas contribuer à peser davantage sur leurs collègues. Ils et elles savent qu’avoir affaire à un « public désigné » est une perte de temps pour tous, et que les contenus dispensés ne seront que peu mis en œuvre, voire pas du tout. A contrario, une formation continue bien organisée c’est aussi un soutien. Une formation continue de qualité, c’est celle où les stagiaires se rendent avec envie, où ils découvrent des façons de faire dans lesquelles ils se projettent. C’est aussi une occasion de découverte culturelle, humaine ou disciplinaire. Choisir ses contenus en fonction de ses centres d’intérêt, des problématiques rencontrées dans son établissement ou des conseils reçus de collègues enthousiastes, est une condition nécessaire pour que les formations soient mises en pratique sur le terrain.
Notre ministre veut réduire le nombre d’heures de cours non assurées, cependant la cible visée n’est pas la bonne. Seulement deux tiers des enseignants du second degré vont en formation continue, et chacun pour en moyenne 2,3 jours par an. Ce n’est qu’une faible part des cours qui n’ont pas lieu. Quant à sacrifier la formation continue pour récupérer 2,3 jours de cours par an et par enseignant, c’est une stratégie à court terme dont nous subirons les effets délétères dès cette année : une offre de formation réduite, des obligations d’assister à un stage non désiré et finalement des enseignants de moins en moins bien formés et toujours plus démotivés… et pendant ce temps, le ministère cherche de nouveaux candidats aux concours de recrutement, il parait qu’on manque de professeurs ! Étonnant, non ?