Bulletin Vert n°467
novembre — décembre 2006
Une archéologie de la géométrie peuples paysans sans écriture
par Olivier Keller
Préface d’Évelyne Barbin
Collection « La figure et le monde », aux éditions Vuibert.
prix : 34 €, co-diffusion APMEP ( brochure n° 939) au prix de 32 € (franco de port).
Bel ouvrage, très bien mis en page, de 326 pages, plus huit pages denses (profusion inutile !) de références bibliographiques et deux pages d’un intéressant index.
Cet ouvrage continue celui, du même auteur, « Aux origines de la géométrie. Le paléolithique et le monde des chasseurs-cueilleurs » (Vuibert, 2004). Il nous conduira jusqu’aux Grecs …, en « définissant des ruptures, des changements », en « établissant des régularités ».
Cette archéologie précède arpentage et mesurage. Elle « produit des graphismes, fabrique des objets, … » en liaison avec des mythes. D’où des « formes voulues » : cercle, croix, carré, …, et des instruments adéquats, les formes étant parfois d’un symbolisme pointu… Mais les textes de l’Égypte et de la Mésopotamie peuvent déjà, ce que fait O. Keller, « s’interprèter à l’aide des figures de la géométrie grecque ». D’autant que d’autres travaux récents corroborent cette assertion à propos des célèbres textes babyloniens.
On lira avec le plus grand intérêt les décryptages d’Olivier Keller, notamment sur « le calcul figuré » des babyloniens et égyptiens.
Le dernier chapitre d’accouchement de la géométrie grecque remplacerait volontiers, dit Évelyne Barbin, « la géométrie des mythes par la géométrie de la philosophie »…
De tout cela, avez-vous l’eau à la bouche ? Je le souhaite ! Voici les titres, abrégés, des dix chapitres :
- Le Paléolithique et le monde des chasseurs-cueilleurs.
- La renaissance néolithique : faits et idéologie.
- … les nouvelles figures dans l’architecture et l’art…
- Aborigènes d’Amérique du Nord. Les peintures sèches des Navajos.
- […] peuples Dogon et Bambara.
- La géométrie du sacrifice dans […] l’Inde védique.
- Les premiers manuels de mathématiques [en Égypte].
- … [et dans l’ancien âge Babylonien].
- … [et dans la Chine des Han].
- Le passage du mythe à la philosophie et la naissance des Éléments (avec les Pythagoriciens, le platonisme, les atomistes, les sophistes et Aristote, …).
La Conclusion met tout cela en synergie grâce à de très riches méditations sur le symbolisme et l’évolution de la pensée vers une attitude scientifique où l’expérience concrète peut s’allier « à la spéculation », où « la pensée en général, et les mathématiques en particulier, ont une caractéristique extraordinaire : elles anticipent ».
Le titre de l’ouvrage n’est guère racoleur, l’ouvrage, lui, est superbe. À mon sens,un chef d’œuvre, à la fois solide et agréable, chaleureusement pensé et écrit. À mettre, au moins, en toute bibliothèque « d’honnête homme », a fortiori de matheux !