Bulletin Vert n°524
septembre — octobre 2017
Hommage à Louis Duvert
Louis Duvert est décédé le 25 mai 2017 à l’âge de 95 ans.
La première fois que j’ai entendu évoquer Louis Duvert, c’était à l’Assemblée Générale des Journées de Besançon, en un temps reculé où Edgar Faure, qui venait juste de quitter le ministère de l’Éducation Nationale, était à la tribune de nos Journées…
C’était au début des « Maths Modernes » et de la création des IREM.
L’Inspection générale participait également à ces Journées et a souligné le dévouement extraordinaire d’un professeur de classes préparatoires qui avait abandonné sa « chaire » pour rejoindre le collège et expérimenter les nouveaux programmes, acceptant ainsi une diminution sensible de son salaire !
Et oui, Louis Duvert allait au bout de ses engagements !
Lui, normalien de la promotion 1941, professeur au lycée Ampère puis au lycée du Parc puis La Martinière à Lyon, a rejoint le collège Jean Moulin d’abord en 6e, pour voir comment le désir de voir transformer l’enseignement des maths peut fonctionner au niveau apprentissage.
À Lyon en effet s’était développé un foisonnement pédagogique autour de ce qui s’est appelé l’Équipe Galion (« Les gars de Lyon »), et Louis, motivé par l’attrait du travail en équipe qui y était pratiqué et intéressé par les maths, certes, mais plus encore par leur pédagogie, s’est intégré à cette équipe.
Il y avait notamment Georges Thovert, René Gauthier, Ginette Mison et Maurice Glaymann. Maurice se souvient de l’apport décisif de Louis au travail de rédaction des fiches Galion : proposition, relecture soignée… C’était un appui très solide, efficace et discret, qui ne lançait une idée que s’il y avait vraiment réfléchi et en avait discuté à plusieurs. Il savait reconnaître la valeur du travail des autres.
L’expérimentation des nouveaux programmes a concerné également l’École Élémentaire avec, à Lyon, le suivi de l’école de Francheville-le-Haut, dans lequel Louis a joué un rôle déterminant.
Louis, adhérent de l’APMEP depuis 1946, a, en même temps, beaucoup collaboré au Bulletin. Voir en particulier sur cette période (1971), le Bulletin 279 intitulé « La mathématique en 4e par ceux qui l’enseignent » avec des articles de Louis « Sur l’expérience en Quatrième » qui s’intéresse à l’apparition des démonstrations.
Puis Louis a su élever la voix et prendre ses distances avec les propositions de programme de 4e issues de la Commission Lichnérowicz. Pour la géométrie notamment, elles comprenaient une définition de la droite affine de 6 ou 7 lignes que même un très bon élève ne pouvait assimiler et que le Canard Enchaîné avait raillée ! Il a été aidé en cela par son autorité de professeur de Taupe.
Comme Louis était de ceux qui pensent que les imperfections du langage mathématique traditionnel et son voisinage avec le français courant gênent les élèves, il a joué, dès 1972, un rôle déterminant dans la création du groupe Mots à l’APMEP et de sa collection de fiches. Ce travail s’est poursuivi de longues années jusqu’en 2005 au moins et visait à aider aussi bien les professeurs de collège que d’école.
Certaines brochures APMEP en sont issues comme « Grandeurs et mesures » devenue la brochure numéro 46 de l’APMEP, toujours utile et en vente ; comme également les brochures intitulées Elem Math, par exemple Elem Math 3 « La division à l’École Élémentaire » (Brochure n°19).
De 1971 à 1982, il a été coresponsable du Bulletin avec Paul-Louis Hennequin, plus particulièrement chargé des relations avec l’imprimeur d’alors, lyonnais comme lui. Un rôle indispensable où, comme à l’accoutumée, il s’est montré aussi efficace que discret.
Il était Président d’honneur de l’APMEP depuis 1982.
Il restera pour nous un modèle d’humilité et de compétence, de sincérité et de solidarité.
Pour conclure, je lui emprunte une citation de Jean Jaurès prononcée lors du discours d’ouverture des Journées nationales de Port-Barcarès le 24 octobre 1985, discours qu’il fit en lieu et place de Gilbert Walusinski, empêché : non pas un « Vive l’APMEP » bien sonore, mais « C’est en allant vers la mer que le fleuve reste fidèle à sa source ».