Lettre aux candidats à l’élection présidentielle

le 20 février 2007

Pascale POMBOURCQ, Présidente de l’APMEP
aux
Candidats à l’élection présidentielle

Mesdames, messieurs les candidats,

Je suis présidente de l’APMEP, association des professeurs de mathématiques de l’enseignement public. Créée en 1910, elle représente les enseignants de mathématiques de la Maternelle à l’Université. Nous œuvrons pour que nos élèves bénéficient de la meilleure formation mathématique possible, ce qui n’est malheureusement pas le cas actuellement malgré le dévouement des enseignants dans leurs classes.
La désaffection corrélative des étudiants pour les filières scientifiques est désormais une certitude et les chefs d’entreprises, ainsi que la commission européenne, s’en inquiètent déjà. La croissance économique repose sur l’innovation qui elle-même a besoin de talents scientifiques. Il y a certainement des raisons conjoncturelles à cette désaffection. La mauvaise image de la science auprès du grand public y contribue très certainement. Mais le fait que nous ne puissions généralement pas dispenser dans l’élémentaire et le secondaire une bonne formation mathématique n’y est pas non plus étrangère. Voici les points qui nous semblent les plus cruciaux.

Au collège :

Il faut aider les élèves en difficulté. Qui irait contre ? Mais les moyens dégagés pour aider ces élèves, déjà insuffisants sont, de plus, pris sur les horaires disciplinaires et mettent ainsi en difficulté, en une cohorte grandissante, un grand nombre d’élèves un peu fragiles faute d’un temps d’apprentissage suffisant. Les dispositifs divers s’entassent sans être évalués, et grignotent peu à peu sur les apprentissages de base.
Nous sommes favorables à l’idée d’un socle commun de connaissances, centré sur un essentiel qui puisse être maîtrisé par quasi tous les élèves à la fin de la scolarité obligatoire. Trop d’élèves sortent du système éducatif sans qualification, nous en convenons. « Le socle commun est le ciment de la Nation », c’est un projet très ambitieux. Les moyens nécessaires à cette ambition vont-ils être dégagés ? A la lecture de la circulaire de rentrée, la réponse est non. Ce ne sont pas quelques PPRE, programmes personnalisés de réussite éducative, que l’on nous présente comme la panacée mais auxquels ne sont attribués aucuns moyens spécifiques, qui vont résoudre tous les problèmes. En revanche la souplesse horaire qui subsistait encore au cycle central va disparaître. Tous les élèves n’auront désormais que quatre heures hebdomadaires de mathématiques en sixième et troisième, et trois heures et demie en cinquième et quatrième. Nous affirmons que ce temps d’enseignement est insuffisant pour la majorité des élèves. Il ne permet pas de travailler suffisamment les objets mathématiques étudiés pour qu’ils puissent se les approprier. Les objets mathématiques sont des constructions mentales que chaque enfant doit réaliser pour lui-même, même si le travail est collectif. Cette construction demande du temps, de la discussion en commun, l’acquisition d’un vocabulaire précis, de l’attention à chacun. Sans ce temps de travail commun, la construction ne se fait pas, et c’est l’échec qui se met en place.
Quelle formation mathématique souhaitez-vous voir apporter aux collégiens ? C’est une décision politique qu’il vous importera peut-être de prendre. Mais notre devoir est de vous avertir que nous ne parvenons pas et que nous ne parviendrons pas à atteindre les objectifs qui nous sont assignés dans les conditions actuelles d’enseignement au collège.

Au lycée :

En tant que professeurs de mathématiques, nous contribuons en particulier à la formation des futurs scientifiques. Nous tenons donc ici à vous alerter sur les problèmes actuels de la section S. La classe de seconde est indifférenciée, là aussi c’est un choix politique que nous respectons, même si nous pensons que cette classe est à aménager. Le pas que les élèves ont à franchir entre la classe de seconde et la classe de première S est considérable. Au cours du premier trimestre de la première S, nous lisons souvent dans leurs yeux leur désarroi. Ils ne comprennent pas ce qui leur arrive. C’étaient fréquemment jusqu’à la fin du collège, voire de la seconde, de bons élèves, jamais encore confrontés à l’échec, et ils vont le rencontrer au pire moment, l’adolescence. Nous, leurs professeurs, sommes écartelés entre ce désarroi que nous ressentons et le niveau mathématique attendu par le baccalauréat et par les enseignants qui les accueilleront deux ans plus tard en post bac. Les horaires de mathématiques ont été réduits en première et terminale S, mais les bases fondamentales des mathématiques qui constituent les contenus des programmes de ces classes sont restées consistantes et difficiles. Nous sommes obligés de passer trop vite d’un chapitre à l’autre, sans laisser aux élèves le temps de maturation nécessaire.
Les physiciens sont particulièrement gênés dans leur enseignement par le niveau mathématique trop médiocre des élèves. C’est pourquoi l’UDPPC, union des professeurs de physique chimie, demande une augmentation des horaires de mathématiques (oui, de mathématiques) en première et terminale S !

Nous sommes les premiers à souffrir de l’image véhiculée par les mathématiques. Des titres de journaux comme « Non à la dictature des mathématiques » ne nous font pas plaisir et nous mettent en colère. Mais, pour que cette image change, il faut que les conditions d’enseignement changent aussi. Et ce sont les politiques et eux seuls qui doivent et peuvent nous en donner les moyens. Nous avons des propositions simples, faciles à mettre en place et peu coûteuses, à vous soumettre. C’est pourquoi nous souhaiterions vous rencontrer pour pouvoir en parler.

« En France, nous sommes habitués à ne pas écouter l’autre », j’espère que vous ferez mentir ce sociologue en acceptant de nous recevoir avant le premier tour de la présidentielle.

Pascale Pombourcq
Présidente de l’APMEP

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