Conférence inaugurale
Code Cjm
L’avenir de l’enseignement des mathématiques
Les mathématiques sauront-elles demain être au cœur d’une révolution épistémologique à l’école et dans la société ?
Yves Chevallard, professeur à l’IUFM d’Aix Marseille
Les mathématiques ont pu être regardées comme le modèle des savoirs transmissibles. Le grec mathêma désigne à l’origine « ce qui est enseigné » et mathêsis « le fait d’apprendre » : les mathématiques furent par excellence ce qui peut s’apprendre. Or l’évolution récente semble avoir mis un point final à cette prétention : l’enseignement des mathématiques tend aujourd’hui à se réduire à une visite de monuments plus ou moins dégradés, que l’on révère encore parfois, que l’on restaure aussi, mais dont la vie s’est retirée au point qu’on en a oublié les usages vivants. Visite tantôt sévère (comme le voudraient les fétichistes d’une certaine école d’avant-hier, qui prétendent par là « sauver les maths ») et tantôt badine, désinvolte, voire niaise (comme la veulent, dérisoirement, certains modernistes attardés). Devant ce tableau, le verdict s’énonce simplement : nécrose épistémologique. Le remède ne peut être que brutal : contre le retour à un passé qui, tel un porteur sain, contenait en lui, secrètement, le mal qui aujourd’hui frappe, contre aussi les turlupinades de médecins improvisés qui se contaminent les uns les autres en croyant « mutualiser » leurs trouvailles, la voie qu’il faut ouvrir de vive force et viabiliser ensemble est celle d’une véritable révolution épistémologique, dont le cœur soit l’école et dont la société tout entière se trouve progressivement pénétrée. C’est à la nature, aux contenus, aux mécanismes et aux conditions de possibilité de cette révolution nécessaire que la conférence présentée ici consacrera ses développements.